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3. Enjeux géopolitiques 

Les hydrates de méthane représentent un enjeu stratégique mondial. A l’aube d’une crise énergétique majeure, cette ressource encore très peu exploitée suscite l’intérêt de nombreuses nations, dans l’espoir de trouver une solution d’approvisionnement à la fois durable et rentable. Si cette ressource est actuellement absente des négociations internationales, certains pays voient en elle un moyen d’acquérir leur autosuffisance énergétique. 



Cette troisième partie s’appuie sur une étude de cas, celle du Japon, seul pays exprimant actuellement un projet d'exploitation durable de l'hydrate de méthane.


En effet, la situation géographique du Japon, qui est un archipel volcanique, le rend quasiment dépourvu de ressources naturelles et énergétiques. Sa seule source d’approvisionnement – toutefois minime – est dans les volcans, qui constituent un puits d’énergie thermique. Ainsi, le taux d’autosuffisance énergétique de l’archipel n’est que de 20%. Par conséquent, 80% de l’énergie Japonaise est importée. Aussi, depuis l’accident de Fukushima en 2011, le Japon remet en question sa stratégie énergétique et sa dépendance en énergie nucléaire, aux propriétés instables et dont l’avenir est incertain. Il se voit alors contraint d’adopter une politique anti-nucléaire et de s’ouvrir à d’autres ressources énergétiques. Si l’on exclut la part du nucléaire dans la production énergétique du Japon, son taux d’autosuffisance n’est plus que de 5% (énergie thermique).

Graphique montrant l’évolution des taux d’importations d’énergie (en % de la consommation) au Japon en fonction du temps (en années)

Ce graphique nous permet d’évaluer l’importance des importations énergétiques au Japon. Il est à noter que la part de ces importations continue d’augmenter au cours du temps, notamment à cause de l’augmentation de la production d’électricité à l’échelle nationale (le Japon est un pays industriel, par conséquent son besoin énergétique est considérable pour alimenter ses industries).

Graphique montrant l’évolution de la consommation d’électricité (en kWh) au Japon au cours du temps (en années)

Ce graphique illustre les propos énoncés précédemment : la consommation électrique Japonaise augmente, conduisant à une croissance des importations énergétiques et ainsi à une accentuation de la dépendance économique Japonaise.


Ainsi, afin de palier à ses besoins énergétiques croissants, le Japon parie sur une nouvelle ressource qui pourrait l’approvisionner pendant plus d’un siècle de par sa quantité considérable : l’hydrate de méthane. Tout d’abord, parce que cette ressource est un moyen pour le Japon de ne plus être dépendant d’états pétroliers comme l’Arabie Saoudite ou l’Iran. L’archipel prévoit à long terme son autosuffisance énergétique, qui délivrerait le pays de contraintes non-seulement économiques, mais aussi politiques : l’énergie étant une ressource inégalement repartie sur la planète, ses détenteurs possèdent un avantage politique important dans les négociations internationales, et peuvent à tout moment menacer d’arrêter les exportations. Il existe trois types de menaces énergétiques géopolitiques à l’heure actuelle : d’abord, le cas où un pays exportateur de matières premières décide, lors d’un conflit, de ne plus fournir ses ressources à certains pays. Ensuite, le cas où les pays dits « de transit » (c’est à dire que des pipelines passent par leur territoire pour acheminer les matières premières vers d’autres pays ; les pays de transit ne sont pas exportateurs) décident d’arrêter l’hébergement de ces conduits, ce qui entraine une interruption de l’acheminement de matières premières jusqu'à ce que d’autres pays acceptent de jouer le rôle de « transit ». Enfin, le cas où un pays de transit est menacé (guerre, catastrophe naturelle, etc.), mettant alors en danger les tuyaux d’acheminement et compromettant ainsi l’acheminement pendant un certain temps.   


Le Japon étant dépendant à 80% de ces puissances externes, il ne peut se permettre de craindre une telle menace et pourrait avec les hydrates de méthane inverser la tendance en évitant les pressions politiques. Ensuite, la facilité d’accès aux hydrates de méthane est un avantage considérable ; en effet, les réserves de ce gaz non-conventionnel se situent proche des littoraux Japonais, permettant à ces derniers une exploitation de proximité et une distribution à l’échelle mondiale de leur ressource territoriale. Cette diversification des activités au Japon pourrait, sur le plan international, lui assurer une prospérité économique durable et une influence politique non-négligeable. 


La carte ci-dessous situe les réserves actuelles de méthane sur le littoral Japonais. Les zones susceptibles de renfermer des hydrates de méthane sont en rouge. En mars 2013, le Japon prévoit la mise en œuvre de ses premiers tests d’exploitation, qui auront lieu dans la portion droite de la grande bande, au Sud de l’ile.

Carte situant les réserves d’hydrates de méthane au Sud du Japon

Toutefois, il est à noter que si certains pays trouveront dans cette énergie des avantages géopolitiques considérables, d’autres au contraire perdront leur statut d’exportateur mondial. La Russie notamment, premier exportateur de gaz au monde, perdra le monopole politique et énergétique qu’elle exerce aujourd’hui envers des pays comme la Finlande ou la Bulgarie, qui dépendent du gaz Russe à 100%, comme nous le montre le graphique ci-dessous.

Le Moyen-Orient aussi pourrait être fortement désavantagé par une commercialisation de ce gaz non-conventionnel. Le document ci-dessous nous montre la part d’exportations de gaz de différents pays ou régions dans le monde. On remarque que le Moyen-Orient est en tête, et exporte plus de 41% du gaz mondial.

Diagramme montrant la part d'exportations de differents pays ou regions du monde, en pourcentage du taux d'exportations total.

D’autres pays encore, comme la France, importent la quasi-totalité de leur gaz (99% du gaz français est importé). En accédant aux hydrates de méthane, ils diminueraient leurs dépenses en gaz et diversifieraient leurs activités et investissements.


En conclusion, les hydrates de méthane représentent un enjeu géopolitique important. Certains pays, comme le Japon, voient en eux un moyen d’obtenir leur indépendance énergétique face à des menaces géopolitiques omniprésentes. La mise sur le marché des hydrates de méthane pourrait alors changer la situation politique de nombreux pays vis-à-vis de la scène internationale, que ce changement soit avantageux ou pas...

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